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    56 ans après, le regard lancé à la fin de ce film est toujours aussi émouvant
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Film qui a révolutionné Hollywood, "Bonnie & Clyde" est porté à bout de bras par un merveilleux duo : Faye Dunaway et Warren Beatty. Deux icônes traversant une Amérique exsangue de la Grande Crise, pour s'achever dans un déchirant final...

    Fasciné par les rudes valeurs de la Frontière et le code moral fruste de ses pionniers et ses hors-la-loi, Sam Peckinpah s'attachait dans La Horde sauvage à dépeindre le crépuscule d'un âge héroïque, l'errance pathétique et convulsive de ses derniers survivants, dans un univers qui n'était plus à leur mesure.

    Pour s'achever dans un étourdissant maëlstrom de violence, un bain de sang final aux allures de cérémonial funèbre au ralenti, qui n'était pas seulement une complaisance esthétique, mais la transfiguration lyrique de la nostalgie du cinéaste pour un Ouest agonisant et sa tendresse envers ceux qu'il appelait "les perdants".

    Warner Bros.

    Si son chef-d'oeuvre fut considéré comme la réponse définitive d'Hollywood à la vague des westerns transalpins et leur violence décomplexée, Arthur Penn avait pourtant grillé la politesse deux ans auparavant avec une oeuvre qui a marqué sa génération, avatar de ce que l'on appellera le Nouvel Hollywood : Bonnie & Clyde.

    Dans une Amérique exsangue et ravagée par les effets dévastateurs de la crise de 1929 qui n'en finit pas, cette odyssée sanglante de Bonnie Parker et de Clyde Barrow, sortie en 1967, trouvait un écho particulièrement vivace dans les grands mouvements contestataires des années 60, liés aux protestations contre la guerre du Viêtnam.

    Si le véritable couple de gangsters -sans grande envergure en réalité- su soigner et entretenir sa légende, Arthur Penn fait de Faye Dunaway et Warren Beatty des personnages mus par la réussite matérielle et sexuelle, toujours jeunes et beaux. Mais plongés dans une réalité des plus sordides, culminant dans un massacre final terrifiant.

    42 ans après, on ne s'est toujours pas remis de la fin déchirante de ce chef-d'œuvre

    Trahi par le père de C.W. Moss (Michael J. Collard), l'un des complices de la bande, le couple tombe dans un guet-apens organisé par le Texas Ranger Franck Hamer (Denver Pyle). Lorsque Bonnie et Clyde s'arrêtent sur le bord de la route pour aider M. Moss à changer un pneu à plat, la police, qui se trouve cachée dans les buissons et dans un véhicule, ouvre le feu et les fusille à bout portant.

    Tandis que Clyde réalise trop tard que sa vie s'arrête là, il échange un ultime et très bref regard avec Bonnie, qui le contemple en lui disant adieu, le fond des yeux déjà embué de larmes, semblant revoir sa vie défiler en une fraction de secondes.

    Revoici la scène...

    Il faut rendre hommage à l'extraordinaire travail de l'immense monteuse que fut Dede Allen, qui entra dans la légende du 7e Art avec cette scène finale : 50 plans se télescopent en une minute, au ralenti, dans un maelström foudroyant, sanglant et bouleversant.

    "Avant, vous ne pouviez pas voir un type tirer et un autre se prendre une balle dans un même cadrage ; il devait y avoir une coupure. Nous voulions rompre avec cela. Le public a le droit de voir les choses comme elles sont réellement" commentera Arthur Penn.

    Le patron du studio, Jack Warner, eu beau éructer à l'issue de la première projection du film, balançant un aimable "Ce sont les deux heures dix les plus longues de ma vie ! Un film pendant lequel on va pisser plus de 3 fois, j'ai jamais vu ça !", le film a heureusement et durablement imprimé le coeur et la rétine des spectateurs.

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