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    "La Femme du ferrailleur" : 3 questions à Danis Tanovic [INTERVIEW]

    Le réalisateur de "No Man's Land" revient à ses racines documentaires en mettant en scène un terrible fait divers. Le film s'avère d'une criante actualité dans une Bosnie en pleine révolution sociale.

    © Dejan Vekic

    Ayant obtenu l'Oscar du meilleur film étranger en 2002 pour No Man's Land, Danis Tanovic travaille autour des thématiques de la guerre (Eyes of War), lui qui a filmé plus de 300 heures de rushes pendant le siège de Sarajevo de 1992 à 1996, et du poids du passé avec L'Enfer ou Cirkus Columbia.

    Pour son nouveau film, La Femme du ferrailleur, ayant obtenu deux récompenses à la Berlinale 2013 (Grand prix et Meilleur acteur), le réalisateur bosniaque revient à ses racines documentaires en mettant en scène un terrible fait divers où un ferrailleur rom se bat pour sauver sa femme dont il ne peut pas payer l'opération faute de sécurité sociale.

    Vos précédents films traitaient de la guerre, qu'est-ce qui vous a poussé à mettre en images ce fait divers ?

    -Je considère que mon cinéma est très engagé socialement. L’histoire de Nazif et Senada méritait d'être traitée, l’accès aux soins devrait être un droit universel et gratuit. En 2011, j’ai lu un article dans un journal local sur ce qui leur était arrivé, et ça m’a révolté. Cette opération ne coutait pas grand-chose, quasiment rien, mais c'était déjà trop pour eux. La détresse économique rend cette histoire dramatique.

    Je suis donc allé à leur rencontre, sans avoir d’idées précises en tête. Tout ce que je savais, c’est que je voulais faire un film de leur histoire, mais j’ignorais encore quel genre de film. Après ma troisième visite, je suis allé voir mon producteur et je lui ai dit que la seule manière de faire ce film était de demander à Nazif et Senada de jouer leurs propres rôles et de ne pas chercher à la financer comme une fiction classique, car cela prendrait au moins un ou deux ans.

    Après avoir eu une aide du Fonds bosniaque, je suis allé sur place avec une petite équipe composée d’amis ayant déjà participé à mes films précédents, et nous avons tourné à l’instinct en neuf jours, en lumière naturelle, sans maquillage, sans costumes. Pendant la Guerre de Bosnie, j’étais documentariste. J’ai appris par conséquent à filmer dans des conditions assez proches de celles que nous avons eues. Cela a été comme un retour à mes racines.

    © Zootrope Films

    En quoi votre film éclaire-t-il le climat insurrectionnel actuel en Bosnie ?

    -Les citoyens se révoltent contre la misère, aujourd’hui la situation est grave. Personne ne veut le reconnaître, mais c’est la débandade. Tous les pays de l’ex-Yougoslavie ont d’énormes dettes et bientôt, le diable va venir reprendre ses droits. Il le fait déjà parmi les couches les plus pauvres. Ce sont eux les premiers qui tombent, quand la crise se propage.

    Quelle est la situation actuelle de l'acteur principal Nazif Mujic qui est sous le coup d'une procédure d'expulsion en Allemagne où il a cherché à trouver refuge après sa récompense à la Berlinale ?

    -Il est toujours en Allemagne avec toute sa famille, il a demandé un asile politique qu'il ne va pas avoir. Nous en avons discuté il y a trois mois et je lui ai dit que c'était une mauvaise idée de partir là-bas. Il n'est pas un réfugié politique mais plutôt un réfugié économique. La Berlinale l'aide, l’accueille et lui a trouvé un avocat. De notre côté, nous espérons voir bientôt l'argent remonter du film pour pouvoir ainsi continuer à l'aider encore un peu.

    Propos recueillis par Nicolas Journet

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